Mardi 24 novembre
Un petit tour vers le Val Blenio… et puis s’en va ! Eh oui, cette sortie s’est conclue par un flop certain : j’avais prévu une rando en boucle sur le sentier historique n°1, au départ d’Acquarossa. Fidèles à nos habitudes très matinales, nous arrivons donc dans la vallée sur le coup des 8h30, après un petit enchainement de transports parfait. Sauf que… c’est bien trop tôt ! Dans ce site très encaissé, en fin d’automne, le soleil ne doit pas pointer son nez avant 10h / 10h30, voire même plus tard… Comme on n’a aucune envie de randonner dans de mauvaises conditions, on décide de rester dans le bus et de poursuivre jusqu’à Olivone, le terminus de la ligne. Étant les seuls passagers, cela fera de la compagnie au chauffeur ! Parvenus à destination, on doit se rendre à l’évidence : premièrement, il fait froid – aux alentours de 0°C… Et deuxièmement, l’itinéraire qui nous tente – vers le col de Lucomagno – est bien trop long à réaliser à cette saison… Du coup, on fait un tour dans le village – ça réchauffe ! – on passe à la boulangerie acheter le pain et… on reprend le bus de retour une heure plus tard ! La marche aura donc été de très courte durée, et finalement, c’est au camping, sous un franc soleil, que nous dégustons notre pique-nique ! Conséquence de ce petit « raté » : une seule photo, prise à Olivone, non loin de l’arrêt de bus ! Mais c’est sûr, aux beaux jours, on reviendra dans cette vallée qui semble superbe…

Mercredi 25 & jeudi 26 novembre
La grosse fraicheur – pour ne pas dire la froidure ! – ne nous incite pas à bouger… La nuit, tout gèle, et au réveil, il faut un bon moment au sol pour qu’il perde son manteau blanc. On profite de ces journées peu actives pour essayer d’organiser notre hiver, ce qui n’est pas chose facile en ces temps perturbés. Les campings français restant à ce jour encore fermés, on oriente nos recherches vers l’Espagne où il devrait faire un poil plus chaud. Dans un premier temps, nous sommes tentés d’aller à Banos de Fortuna, un minuscule village de la province de Murcia, posé dans un cadre désertique original et doté d’un camping proposant une balnéothérapie bien agréable, camping que l’on recommande chaudement ! Autre argument positif, nos amis Jessy et Laurent y seront. Toutefois, deux bémols nous encouragent à rester non loin de la France : d’abord, il nous sera plus facile de voir nos filles quand elles pourront voyager – pour rappel, une est à Londres, l’autre à New York. Ensuite, dès que le vaccin anti-covid sera disponible, nous nous mettrons immédiatement dans les starting-blocks pour l’obtenir. Nous jugeons donc plus sage d’opter pour un séjour à Roses, une station balnéaire de Catalogne, située à seulement 30km de la frontière. Nous ne connaissons que très peu cette région, mais a priori, elle offre de belles opportunités de randos à pied et de balades à vélo…
Vendredi 27 novembre
Il ne fait pas plus chaud ce matin, mais il faut beau et on en profite pour aller faire un tour au sud de Lugano. Après l’habituel enchainement de transports – cette fois, nous ne sommes pas partis à l’aube, mais à 9h – nous arrivons à 10h30 à Campione d’Italia, une surprenante commune lombarde enclavée dans le Tessin. Eh oui, après avoir frôlé six fois la frontière depuis notre arrivée dans ce canton, cette fois nous l’avons franchie : nous sommes en Italie ! Heureusement que nous n’avons pas été plus matinaux car le bourg endormi est encore totalement dans l’ombre, alors qu’en face, le Monte Salvatore éclate de beauté sous le soleil…


Pour comprendre la particularité italienne de ce minuscule territoire enclavé en terre helvétique, il faut remonter à… 777 ! A cette date, le seigneur local, Totone di Campione, fait légataire universel de ses biens et terres l’archevêque de Milan, qui les confie à l’abbaye Saint-Ambroise située dans la capitale lombarde. La commune est alors détachée de ses voisines, qui tombent dans le giron de l’évêque de Côme. En 1521, le pape Jules II donne le Tessin à la Confédération suisse qui avait été son alliée pendant la Sainte Ligue. Néanmoins, les moines de Saint Ambroise font reconnaître en justice leur souveraineté sur Campione qui, à cette époque, s’étend des deux côtés du lac, créant ainsi un régime d’exception qui va s’étaler sur plusieurs siècles. Au début du XIXe siècle, le Tessin propose d’échanger Campione contre une autre commune, Indemini – rappelez-vous, nous y sommes passés lors de notre randonnée au Monte Gambarogno – mais cette initiative reste sans suite, et un référendum manifeste l’opposition des habitants au rattachement à la Confédération. Suite à des troubles en Italie, les habitants finissent eux-mêmes en 1848 par demander leur rattachement, mais cette fois, c’est le Conseil fédéral qui refuse la proposition, dans un but de stricte neutralité. Finalement, Campione perd une partie de son territoire, mais conserve le bourg où nous nous trouvons actuellement. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la ville rallie le gouvernement royal d’Italie qui lutte contre la République de Salò, État fantoche fasciste établi par Mussolini et soutenu par les armées de l’Allemagne nazie. Cet épisode va provoquer l’isolement de la ville et le renforcement de ses liens avec la Suisse. (source Wikipedia)

Donc, si vous avez bien suivi ce rappel historique, nous sommes toujours dans le Tessin mais aussi… en Italie ! Ainsi, les voitures portent des plaques d’immatriculation helvétiques, la monnaie est le franc suisse mais les habitants sont soumis aux lois italiennes ! Ce qui, actuellement, signifie que le territoire est confiné, le port du masque est obligatoire partout en extérieur et que bars et restaurants gardent porte close… Un petit détail qui m’avait échappé car, au départ, je pensais que l’on déjeunerait dans une pizzeria du bord du lac !

Pendant des décennies, l’enclave a tiré la principale source de ses revenus du casino, le plus grand d’Europe. Ouvert en 1917, il a fait peau neuve en 2007, sous la houlette de l’architecte suisse Mario Botta. Dire que le bâtiment est harmonieux serait mentir, mais au bout d’un moment on finit par s’habituer à son apparence très massive pour ne pas dire mussolinienne ! Avec une telle manne financière, l’avenir aurait pu sourire à Campione… Malheureusement, le casino a fait faillite en 2018, plongeant ainsi une bonne partie de la population dans un inéluctable chômage. En ville, l’atmosphère s’en ressent nettement : hormis une petite épicerie de dépannage et quelques restaurants, aucun commerce n’a résisté à la banqueroute. C’est donc une triple peine que subissent les Campionese avec un avenir bouché par la crise économique qui affecte l’enclave, un coût de la vie helvétique et, en ce moment, les contraintes du confinement lombard…


Ainsi, c’est dans une ambiance assez morose que l’on arpente le bord du lac où l’on ne croise que quelques rares passants. Quel contraste avec la rive opposée, où subitement, Lugano nous apparait comme une ville en perpétuelle effervescence ! Heureusement, on se console avec la magnifique vue sur le Monte Salvatore : où que se pose notre regard, on ne peut y échapper !


Comme on a presque une heure devant nous avant le prochain bus, on remonte la route principale à pied jusqu’à l’arche qui matérialise la frontière. En chemin, on visite le sanctuaire Santa Maria dei Ghirli, posé en bord de lac, dont les fresques les plus anciennes datent du XIIIe siècle. Le cadre est somptueux et un temps, on oublie l’impression de désolation que nous a laissé Campione.








A 11h30, on repart en bus à Lugano – mieux valait ne pas le manquer, le suivant étant à 13h ! – et on descend à Paradiso.

Là, on emprunte l’agréable promenade qui longe le lac, et en prenant notre temps – et le soleil ! – on rejoint le centre historique.

On avait prévu de déjeuner dans la très bonne pizzéria dénichée il y a trois semaines, mais pas de bol, la terrasse est intégralement plongée dans l’ombre, avancée de l’hiver oblige ! Comme on ne souhaite pas s’installer dans la salle intérieure, on se rabat sur des petits sandwiches et une bonne glace que l’on déguste les pieds presque dans l’eau du lac.

Il ne nous reste alors qu’à rentrer au camping – après les habituels funiculaire, train et bus – mais à la différence de vendredi, aujourd’hui tout s’enchaine lentement, ce qui nous laisse suffisamment de temps pour aller faire quelques courses à Bellinzona.
Samedi 28 & dimanche 29 novembre
De nouveau, on reste au camping où les camping-cars se font de plus en plus rares… Logique, avec une telle fraicheur, les balades se font, elles aussi, de plus en plus difficiles à réaliser. On se contente donc d’une petite promenade digestive vers le Tessin… Demain, on a prévu un dernier retour dans la vallée de la Verzasca, à Sonogno, plus pour le plaisir de revoir ce beau village de pierre que pour vraiment y randonner… Et comme le site est ensoleillé uniquement le matin, on a encore prévu un départ aux aurores !
- INFOS PRATIQUES
- Camping Isola, à Gudo, entre Locarno et Bellinzona. Arrêt de bus à 300m (une liaison par heure dans chaque sens) et piste cyclable à proximité immédiate. Commerces à 4km. Accueil très souriant, le personnel s’est vraiment décarcassé pour nous trouver une place avec une bonne connexion wifi, comme demandé lors de la réservation. Sanitaires très propres. Restaurant, petite épicerie, piscine. Camping ouvert à l’année. CHF 26-. la nuit pour 2 personnes, le camping-car, l’électricité et les taxes, avec la carte ACSI. On recommande !
- Déplacements dans le Tessin : dès lors que l’on passe une nuit dans un établissement hôtelier, locatif ou un camping, on bénéficie du Ticino Ticket qui offre les transports gratuits dans tout le Tessin ainsi que des réductions dans les musées et les remontées mécaniques. Très belle initiative !
- Campione d’Italia : accès par le bus 439 depuis Lugano (depuis Gudo & Bellinzona, on a pris ce bus à la gare de Melide), durée 20mn, attention départs assez peu fréquents. Inclus dans le Ticino Ticket. Pour la visite, si en une heure, on a largement le temps de faire le tour du village, on conseille d’aller y déjeuner pour soutenir l’économie locale !