Jeudi 16 février
A 7h tapante, nous quittons notre charmante auberge pour nous poster sur le trottoir qui lui fait face. Moins de dix minutes plus tard, une navette de la compagnie Serra Verde Express nous récupère, et nous emmène à la gare ferroviaire où, à 8h30, nous embarquons à bord du train touristique, dans le wagon de queue – appelé Barão do Serro Azul – qui a la particularité d’avoir une terrasse extérieure idéale pour prendre des photos et être au plus près de la nature. Et c’est parti pour quatre heure de voyage qui vont, à petite vitesse, nous faire traverser le parc national Pico do Marumbi…



En attendant, nous quittons Curitiba sous un ciel gris-blanc peu engageant… Heureusement, quelques fresques murales – qui rappellent l’histoire de la ligne ferroviaire – apportent une touche de couleur bienvenue !




Peu à peu, nous nous enfonçons dans la verdure… et par chance, au fil du voyage, le soleil va finir par apparaitre !



Première ligne de chemin de fer du Paraná, la liaison entre le port de Paranagua, ouvrant sur l’Atlantique, et Curitiba fut principalement conçue pour faciliter les échanges commerciaux. Avant sa mise en service fin 1884, les frères Antônio, André et José Rebouças avaient été, dès 1971, les premiers ingénieurs à travailler sur le projet – à l’époque, ils pensaient surtout relier Curitiba et Antonina, un port au nord-ouest de Paranagua ; mais après une querelle d’ingénieurs sur le sujet, ce fut finalement le gouvernement qui imposa cette dernière ville comme terminus de la ligne.






Long de 110km, le tracé est considéré comme le chef-d’œuvre d’ingénierie le plus audacieux au monde de la fin du XIXe siècle. Appartenant à la société belgo-française « Chemin de Fer Brésilien » qui avait acquis la concession de la ligne, ce sont les ingénieurs Antonio Ferrucci et Joao Teixeira Soares qui supervisèrent tous les travaux. Ainsi, grâce au train, de nombreuses marchandises – dont le bois et le yerba maté, une herbe permettant de produire le maté, une boisson riche en caféine – pouvaient être ensuite exportées en Europe par bateau. Avant le chemin de fer, pendant plus de 200 ans, le seul lien entre la côte et le plateau du Paraná était l’Estrada da Graciosa, un sentier ouvert par les indigènes, puis goudronné.



Neuf mille ouvriers participèrent à la construction, dans des conditions de travail difficiles – la zone était marécageuse et sujette aux inondations, et il n’y avait pas de route pour faciliter le transport. Il faut toutefois noter qu’aucun esclave n’a été enrôlé dans le chantier, alors que l’esclavage était encore en vigueur.



Tout au long de la ligne, on compte 14 tunnels – dont le plus grand mesure 457 mètres de long – plus de dix gares intermédiaires et une trentaine de ponts et viaducs – le Ponte Sao Jao, en métal, est très impressionnant !




De nos jours, si le transport des marchandises est toujours assuré sur l’ensemble de la ligne, les passagers ne voyagent désormais que sur le tronçon Curitiba / Morretes, sur un parcours d’environ 70km. On y découvre un paysage splendide, avec de magnifiques vues sur le Pico do Marumbi. Aussi appelé Pico Olimpo, ce sommet de 1539m d’altitude a été gravi pour la première fois le 21 août 1879, en pleine construction du chemin de fer, par Joaquim Olimpio Carmeliano de Miranda, Bento Manoel de Leão, Antônio Silva et Antônio Messias. Ainsi débuta l’alpinisme au Brésil…


Après plus de trois heures de voyage, le train entame sa descente vers le fond de la vallée. Eh oui, partis à 935m d’altitude à Curitiba, l’arrivée se fait quasiment au niveau de la mer : un petit détail que nous n’avions pas pris en compte, mais que nous ne pouvons ignorer du fait de la subite augmentation de la température qui a repris une dizaine de degrés ! Avant de rejoindre notre but final, nous passons devant la gare de Marumbi, au style colonial affirmé.





Puis c’est l’arrivée à Morretes, au terme d’un splendide voyage en train, peut-être un de plus beaux que nous ayons fait ! Et quelle chance nous avons eu d’avoir une si bonne météo…

A la gare, notre guide Gaby nous emmène ensuite, avec un petit groupe, déjeuner dans un restaurant typique du village. Au menu : le barreado, un mélange de viandes cuites durant de longues heures dans leur jus, qui se déguste avec de la farine de manioc, du riz, des crudités et des bananes. Et comme les restaurateurs craignaient que l’on reste sur notre faim, ils ont également ajoutés du poisson pané, des crevettes et des acras de morue. Original et très nourrissant !
Nous disposons ensuite d’un moment pour découvrir Morretes, un gros village d’environ 17.000 habitants, fondé en 1721. Jusqu’au XVIe siècle, la région était peuplée par les Indiens Carijós, un groupe indigène qui occupait la bande côtière brésilienne de Cananeia à Lagoa dos Patos. A partir de 1646, avec la découverte de gisements d’or, mineurs et des aventuriers venus de São Paulo investirent les lieux…


Nous rejoignons notre guide à 14h30 et nous découvrons le Parc thématique Hisgeopar qui présente l’histoire du Paraná à travers plusieurs maquettes animées. Après cette visite relativement rapide – une vingtaine de minutes tout au plus – le chauffeur nous ramène à Morretes. Tandis que le groupe poursuit l’excursion vers Antonina et rentre à Curitiba, nous, nous posons nos valises pour deux nuits dans le village. Ce tour combinant voyage en train, repas et visites nous a pleinement enchantés tant par sa diversité que par les splendides paysages traversés ! Comme souvent dès qu’il s’agit de montagne, Gérard se voyait déjà partir à l’assaut du Pico do Marumbi…
Une fois installés à l’hôtel, nous nous accordons deux petites heures de repos, puis nous repartons en fin d’après-midi boire un verre au bord de la rivière. Le cadre est agréable, mais ô surprise, nous sommes presque seuls dans le village subitement désert… Heureusement, quelques ouistitis nous tiennent compagnie !






Vendredi 17 février
Il a plu dans la nuit, et au réveil, de gros nuages gris demeurent accrochés aux montagnes… Nous partons tout de même faire un tour de village ; comme hier soir, le lieux sont encore très tranquilles, les passagers du train n’ont encore pas débarqué. Peu à peu, les boutiques ouvrent leurs portes et les stands d’artisanat se mettent en place…



Malgré la chaleur étouffante, nous marchons tout de même le long de la rivière, à nos yeux l’endroit le plus charmant de Morretes.



Puis nous déjeunons dans un resto en plein air joliment décoré. Au menu, du poisson frit et des acras de morue, histoire de faire un peu plus léger que la veille !




En début d’après-midi, la pluie s’invite et nous retournons nous mettre à l’abri à l’hôtel. Au fil des heures, ne constatant aucune amélioration du côté du ciel, nous ressortons tout de même boire un verre – toujours au bord de la rivière… A cause de cette météo bien perturbée, il y a encore moins de monde que la veille !



Samedi après-midi, nous quitterons Morretes pour Paraty, un long voyage de plus de 26h via Curitiba et Sao Paulo, où nous changerons trois fois de bus, et subirons une chute brutale de la température, avec un 14°C inattendu et finalement peu agréable pendant notre longue attente dans la capitale du Paraná ! Mais ceci est une autre histoire que nous vous raconterons dans le prochain article…
Un grand merci à Anna pour son aide précieuse quant à l’organisation de notre tour et de notre magnifique voyage en train : une vraie réussite !
- INFOS PRATIQUES
- Arriver à Morretes depuis Curitiba : par le train de la Serra Verde Express, un voyage unique à ne pas rater ! Départ à 8h30 (généralement du vendredi au dimanche, tous les jours en janvier, février et les 2 dernières semaines de juillet) de la gare ferroviaire de Curitiba (pas loin de celle des bus), environ 4h de trajet. Plusieurs classes possibles dans le train, et plusieurs options possibles : on conseille d’opter pour le wagon Barão do Serro Azul qui possède une terrasse extérieure idéale pour les photos, et de prendre le tour complet à la journée (inclus transfert depuis l’hôtel à Curitiba, voyage en train avec collation et boissons, guide, déjeuner de spécialités à Morretes (très copieux), temps libre à Morretes et Antonina, visite du Parc thématique Hisgeopar et retour à Curitiba par la route historique). Nous avons abandonné le tour à Morretes pour y passer 2 nuits, mais finalement, pour ceux qui manque de temps, ce n’est pas indispensable, d’autant que le soir, il n’y a aucune animation ! Guides charmants et compétents. R$449 pour la classe Barão do Serro Azul, autres forfaits possibles, billets de train « secs », consulter le site pour plus d’infos. Il est aussi possible d’opter pour le train « retour », départ vers 15h de Morretes. Résa préalable indispensable. Un coup de cœur pour nous !
- Logement : Pousada Cidreira, idéalement située au cœur du village, à deux pas de la rivière. Néanmoins, on n’a pas été satisfait de l’accueil car on a essayé de nous refourguer une chambre avec fenêtre donnant sur dépotoir alors que nous avions réservé (et payé !) pour une chambre avec balcon donnant sur la ville et la montagne. Finalement, après avoir râlé (ce n’est pas notre habitude du tout, mais là, on trouvait qu’ils poussaient un peu, une fois de plus c’était une période de fête (le carnaval) et ils avaient a priori fait du surbooking). Attention, pour les personnes à mobilité réduite, les marches d’escalier pour accéder à la réception et aux chambres (aux 1er et 2ème étages) sont très hautes, le double d’une marche normale ! Piscine, bon petit-déjeuner inclus, wifi très correct. Chambre double avec salle de bain privée, clim, frigo et balcon, environ 45€ la nuit, résa via Booking.
- A voir / A faire à Morretes :
- Excursion au départ de Curitiba avec le train de la Serra Verde Express qui, à lui seul, justifie le voyage ! Voir ci-dessus les infos pratiques.
- Balade dans le village, le long de la rivière.
- Nombreux restaurants de spécialités locales, pour la plupart ouvert seulement le midi.
- A priori, il y a aussi pas mal de randos possibles à faire dans la région, mais accéder aux départs nécessite voiture (et sûrement guide), se renseigner car pas testé. Il est aussi possible d’aller à Antonina en bus (on a zappé car météo très pluvieuse).
- Quitter Morretes pour Paraty : un peu le parcours du combattant qui nous a pris un peu plus de 26h ! Bus Morretes => Curitiba, quelques bus par jour, on a choisi celui de 14h30, durée 1h30, R$30, réserver son billet dès l’arrivée à Morretes car ce bus est vite complet (surtout un samedi), présentation de l’original obligatoire pour embarquer. Bus Curitiba => Sao Paulo, nombreux bus quotidiens, plusieurs compagnies, on a opté pour un départ à 23h59 (à cause des intempéries, le bus est arrivé à 1h15, on a failli rater la correspondance !), durée 7h, 33€ résa via Busbud. Pour info, la salle d’attente de la gare routière de Curitiba est correcte. Bus Sao Paulo => Paraty, 3 bus par jour, on a choisi le départ de 8h, durée normale 6h (on a mis 8h à cause des intempéries et des routes coupées qui nous ont obligés à faire un grand détour), 21€ résa via Busbud.
D’abord un grand merci pour votre blog, tellement inspirant. Magifiques photos, récits vivants et documentés, je me régale ! D’autant que nous partirons début 2024, mon mari et moi, la soixantaine, pour un long voyage en Amérique du Sud qui commencera par… le Brésil !
Une petite question par rapport au train: avez vous dû réserver longtemps acant et par quel canal ? Merci
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Merci beaucoup pour votre message qui nous va droit au cœur !
Je vous souhaite autant de plaisir que nous pour votre futur voyage : avez-vous une page Facebook ou un blog pour que l’on puisse vous suivre ? Quel trajet envisagez-vous ?
Concernant la réservation pour le train, étant blogueurs, nous avons contacté le service presse / media et et nos billets ont été réservés par cette voie.
Le mieux pour réserver semble être via leur site web (soit categoria Boutique, soit categoria Turistica selon la classe choisie, personnellement, je conseille notre wagon de queue, un peu plus cher mais vraiment agréable). Ce serait à refaire, on ne passerait pas deux nuits à Morretes, trop longuet, et on rentrerait directement avec l’excursion.
En haute saison, je pense qu’il faut s’y prendre à l’avance pour réserver le billet (nous, on a réservé environ un mois avant, mais on était en période de haute saison touristique). En basse saison, c’est sûrement plus calme (quoique le week-end, les Brésiliens bougent beaucoup !).
Un conseil si vous ne voulez pas vous « bloquer » avec une réservation effectuée longtemps à l’avance : allez le matin à Morretes en bus (depuis la gare routière de Curitiba, compagnie Graçias je crois, ou qq chose comme ça), prenez le temps de vous balader dans le village, déjeunez dans un resto typique, et prenez le train du retour, vers 15h. Il est traditionnellement beaucoup moins chargé que celui du matin dans le sens inverse. Dans ce cas, je pense que vous pouvez réserver le billet la veille ou l’avant-veille à Curitiba. Dernier conseil : prenez toujours vos passeports (et pas des photocopies) avant de prendre un transport au Brésil, ils sont très souvent exigés !
Bon futur périple, et en attendant, bonne préparation !
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Merci beaucoup. Malin l’idee du retour en train. On fera un polarsteps pour notre voyage mais il n’est pas commencé. Bonne continuation
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Merci ! Pourrez-vous nous envoyer votre polarsteps quand il sera créé ? On vous suivra avec plaisir !
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Bien sûr . bonne route !
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