Mercredi 15 janvier
La nuit a été calme dans notre douillet B&B, et c’est en pleine forme que l’on part visiter les ruines les plus célèbres de l’ile : la Vallée des Temples d’Agrigente. On pinaille un peu – beaucoup ! – pour trouver le bon parking, à savoir celui qui se trouve au sommet du site, non loin du Temple de Junon. En effet, mieux vaut avoir le soleil dans le dos pour obtenir de beaux clichés, sans contre-jour systématique. Une fois la voiture enfin garée, on attaque la visite de cette ville antique, fondée en 581 avant JC – pour une fois, c’est précis ! – sous le nom d’Akragas. Quelques années plus tard, la cité fut fortifiée sous le règne de Phalaris, un tyran inventeur d’un instrument de torture particulièrement barbare : il enfermait ses ennemis à l’intérieur d’un grand taureau de bronze sous lequel un feu était allumé. Haï par son peuple pour sa cruauté sans limite, le despote fut lapidé sans pitié… Au fil des ans, la ville s’opposa violemment aux Carthaginois, mais sous le régime de Théron – un autre tyran qui régna de -488 à -472 – la cité remporta une large victoire sur l’ennemi, ce qui mit temporairement un terme au conflit. A cette époque, Akragas comptait alors environ 200 000 citoyens. Soixante-dix ans plus tard, la guerre reprit et la ville fut en grande partie détruite. Timoléon, un général corinthien, la reconquit en -338, et comme l’avait souhaité le philosophe Empédocle plus de cent ans auparavant, il la reconstruisit en y installant un régime démocratique. L’un des premiers au monde… Un siècle plus tard, ce fut au tour des Romains de s’emparer de la cité nouvellement rebaptisée Agrigentum.

Plongés dans l’histoire perturbée de cette ville, on attaque la balade de deux kilomètres où, le long d’une crête, s’égrènent une dizaine de temples. Le premier qui s’offre à nos yeux est celui dédié à Junon – ou Héra pour les Grecs – bien que les archéologues ne soient pas vraiment sûrs qu’il ait été attribué à la déesse du mariage et de l’accouchement. Incendié en -406 par les Carthaginois, le temple fut réparé par les Romains et les tuiles de terre cuite remplacèrent alors celles de marbre.


Quelques centaines de mètres plus loin, se dresse le majestueux temple de la Concorde qui est l’un des temples les mieux conservés de l’antiquité grecque. Edifié entre -440 et -430, c’est le temple d’Agrigente qui a été réalisé avec le plus de précision. Les recherches ont également montré que les parties inférieures étaient ornées de stucs blancs, tandis que les frises, métopes et parties hautes étaient peintes de couleurs vives. Quant au toit, il était couvert de tuiles de marbre. Un rendu pas toujours facile à imaginer quand il ne reste que des colonnes nues et un fronton dépouillé de tout ornement…



Alors que presque tous les bâtiments d’Agrigente avaient été détruits par les tremblements de terre et par les fanatiques chrétiens du IVe siècle, seul le Temple de la Concorde est resté debout : en effet, ayant été réutilisé, à la fin du VIe siècle après JC, pour être transformé en basilique chrétienne, l’édifice fut ainsi préservé d’une destruction certaine…


Outre les ruines antiques, ce que l’on apprécie particulièrement sur ce site, c’est la végétation qui commence à prendre des allures printanières, notamment avec les nombreux amandiers en fleurs…


Après avoir traversé un jardin, on débouche sur le temple d’Héraclès dont les huit colonnes ont été relevées en 1924.

Non loin, se dressait le gigantesque Temple de Zeus Olympien dont il ne reste malheureusement plus grand-chose de l’édifice construit sous le règne de Théron. Mais on imagine aisément ses dimensions exceptionnelles : avec ses 56m de largeur pour 113m de longueur, l’Olympiéion d’Akragas était – et demeure ! – le plus grand de tous les temples doriques et le troisième parmi les temples grecs. Et pour parfaire l’ensemble, d’énormes statues représentant des figures masculines – des télamons – soutenaient le haut du bâtiment. À une cinquantaine de mètres de là, on devine les restes d’un autel monumental avec des gradins conduisant à la plateforme où avaient lieu les sacrifices qui étaient typiquement des hécatombes, autrement dit des sacrifices de cent taureaux.

On termine la découverte du site par le temple de Castor et Pollux, particulièrement photogénique. De là, on a également une très belle vue sur la ville nouvelle d’Agrigente.


Comme à Sélinonte – mais plus encore peut-être – on apprécie l’aspect pédagogique des panneaux informatifs : ils sont vraiment bien faits, avec des dessins précis décrivant le travail d’alors des bâtisseurs de temples. Et mieux encore, plusieurs reconstitutions de machines employées sous l’Antiquité sont disséminées sur le site : ainsi, on comprend mieux comment ces immenses édifices étaient bâtis !


Après presque trois heures de visite, il ne nous reste qu’à rebrousser chemin : et hop, de nouveau deux kilomètres à parcourir pour regagner le parking, en montée cette fois ! A mi-parcours, on découvre un lieu de mémoire pas vu à l’aller : une vingtaine de stèles rappellent l’engagement pour le respect des droits de l’homme, de personnalités qui ont souvent perdu la vie à poursuivre ce combat.

On reprend la voiture et on rejoint la ville haute d’Agrigente. Se garer nous prend au moins vingt minutes en nous faisant faire des tours et des détours dans des ruelles étroites – pour changer ! Finalement, Gérard – le roi du créneau serré – se case entre deux véhicules, et on part faire un tour via Athéna, réputée être la plus jolie artère de la ville. Bon… Pour être francs, on n’a pas trop accroché – la rue n’est pas piétonne et est particulièrement sombre et étroite – et on est vite repartis, après avoir avalé un bon panini mortadelle-fromage-condiments aux poivrons. Si on avait su, on ne se serait pas embêtés pour trouver une place de parking !
Du coup, on roule jusqu’à la Scala dei Turchi, un extraordinaire pan de marne – un mélange d’argile et de calcaire – blanche et lisse, qui s’étale en pente plus ou moins douce vers la mer. On commence par observer cette formation depuis un belvédère, puis on descend une belle volée de marches pour atteindre le rivage. Sublime !



Après une belle balade sur la plage, on remonte – il fait vraiment très chaud, je crois bien qu’on aurait pu oser une trempette, mais une fois de plus, on n’a pas les maillots ! Acte manqué ? – et on rentre à l’hôtel pour deux petites heures de repos. Enfin pas tout à fait puisque l’on trie les nombreuses photos de la journée… Puis vers 19h, on sort diner dans le même resto qu’hier. Leurs plats de pâtes et de risotto sont excellents, tout comme le petit vin blanc qui les arrose ! Après un dessert et une ultime balade dans l’agréable petit centre-ville de Porto Empédocle bien éclairé, on est de retour dans notre chambre – dont les dimensions nous changent de notre camping-car !


Jeudi 16 janvier
Après un copieux petit-déjeuner, on quitte Porto Empédocle vers 9h. On emprunte de toutes petites routes de montagne pour traverser la Sicile du sud au nord, mais comme la semaine dernière, on est un peu déçus par les paysages très urbanisés. Et pas de bol, on est un moment plongés dans une épaisse brume… Après plus de deux heures de trajet, on parvient à Corleone, une ville connue pour être le lieu de naissance de plusieurs chef mafieux. C’est aussi le nom que porte le Parrain, dans le film de Coppola. Aujourd’hui, la situation semble s’être assainie et seuls quelques vieux prennent le soleil sur la place principale, en nous dévisageant avec insistance, comme s’ils n’avaient jamais vu un étranger de leur vie ! Le tour du bourg ancien est rapide, on n’est pas conquis… On reprend donc la voiture, et après quelques frayeurs dans des ruelles pas plus larges que la Panda, on retrouve la route de Palerme. Après quelques courses et un passage express au camping-car pour déposer nos sacs et déjeuner sur le pouce, on repart à l’aéroport rendre notre Titine à l’agence de location. On a beaucoup apprécié cette petite escapade de trois jours, et si tout se passe bien, on devrait remettre ça dans une dizaine de jours pour partir à la découverte de Catane et de Syracuse !
Petit changement de programme de dernière minute : on avait prévu de passer une semaine à Malte au départ de Catane. Mais en préparant les visites, on s’est rendu compte que l’ile principale ne nous tentait que très moyennement – urbanisation galopante et beaucoup de retraités anglais en goguette ! On n’a rien contre mais bon… Si on a évité l’Espagne pour ses maisons de retraites géantes, ce n’est pas pour retrouver la même chose à Malte ! Et ce qui nous plaisait vraiment, c’était l’ile de Gozo pour ses nombreuses randos. L’hiver et sa météo capricieuse n’étant pas le meilleur moment pour prévoir une telle activité, on a préféré repousser à une autre fois cette escapade. Finalement, on restera dans la région de Palerme que l’on adore jusqu’à mi-février – le camping est idéalement placé à deux pas du village et de la mer – et on relouera une voiture pour une quinzaine de jours afin de découvrir le sud-est de la Sicile – Catane, l’Etna, Syracuse, Raguse, Noto, Caltagirone et Enna – avec de nouveau des nuits à l’hôtel. D’ici là, la pluie étant annoncée pour une partie de la semaine, on va se contenter de petites balades dans les environs…
INFOS PRATIQUES
- Logement : B&B Sicily, situé au cœur de la ville basse Porto Empedocle. Accueil charmant, chambre très bien équipée avec salle de bain privée, balcon et wifi. Cuisine commune. Très bon petit-déjeuner inclus. On peut se garer dans la petite rue mais mieux vaut avoir un petit véhicule. Au pire, le parking vers le port est à 5mn de marche. Une excellente adresse que l’on recommande chaudement ! 34€ la nuit, résa via Booking.com
- Location de voiture, agence InterRent via résa en ligne sur Rentalcar, 47.73€ pour 10 jours (oui, oui, vous avez bien lu, le tarif est absolument incroyable !), pour une Panda quasiment neuve !
- Site archéologique de la Vallée des Temples, 8h30-19h30 (à vérifier, cela me semble tard en hiver !), 12€ / 15.50€ le billet combiné avec le musée. Il y a deux entrées, nous avons préféré celle située en haut du site, à côté du temple de Junon (c’est mieux pour les photos, de faire la balade dans ce sens !), mais cela oblige à remonter tout le site face au soleil vers midi. En hiver, même s’il fait chaud, ce n’est pas un problème.
Ce coin a l’air vraiment magnifique ! Je crois qu’effectivement, il faudrait passer plusieurs semaines en Sicile pour découvrir cette île et tous ses trésors…
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On y a passé presque trois mois l’hiver dernier, et il nous reste de nombreux coins à découvrir ! Mais ce qu’on a le plus apprécié, c’est la gentillesse des Siciliens avec qui le contact a toujours été très facile… On a eu un vrai coup de cœur pour cette ile que l’on ne connaissait pas !
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