Mardi 23 mars
La tramontane a soufflé sans discontinuer ces neuf derniers jours, engendrant des rafales quasi-permanentes à 80km/h… Autant dire qu’avec un tel zef, nous n’avons que peu mis les pieds dehors ! C’est donc ravis que, ce matin, nous renfourchons nos vélos, Eole semblant s’être un peu calmé. Objectif du jour : le site archéologique d’Empuries, situé à une trentaine de kilomètres au sud de Roses. Nous prenons donc la route d’Empuriabrava, puis celle du parc naturel des Aiguamolls, et nous rejoignons facilement Sant Pere Pescador. Ensuite, en l’absence de tout fléchage, on pinaille un peu pour trouver le chemin menant à Sant Martí d’Empúries, mais finalement, après avoir longé plusieurs immenses campings encore déserts et parcouru une dizaine de kilomètres, nous parvenons à bon port ! Surplombant la mer, le petit village possède un charme certain, et de ses vieilles pierres au caractère médiéval très marqué, le poids de l’histoire se dégage nettement. D’ailleurs, du IXe siècle à 1078, Sant Martí d’Empúries fut la capitale du comté d’Empúries, avant d’être transférée à Castelló d’Empúries, dans une zone mieux protégée des attaques.




D’après la carte, le site archéologique devrait se situer dans les environs… Mais une fois de plus, le manque de panneaux nous fait partir dans une mauvaise direction : on rate la piste cyclable qui y mène directement, et après un grand détour, on se retrouve à l’Escala. Et hop quelques kilomètres supplémentaires dans les mollets ! Heureusement, un passant nous indique la direction à suivre, et on arrive enfin au site en quelques minutes de pédalage. Pour notre décharge, il faut reconnaitre que l’entrée du parc archéologique est vraiment confidentielle, et surtout qu’aucun fléchage ne l’indique clairement !
Une fois les vélos attachés, on se retrouve immédiatement plongés dans le monde antique… Fondée vers 580 avant JC par des colons phocéens comme comptoir, Empurion – dont la signification désigne un lieu destiné au commerce – est ensuite occupée par les Romains, avant d’être abandonnée au haut Moyen Âge. Le site se divise en trois parties distinctes : Paléopolis (cité du premier établissement phocéen, située sous l’actuel village de Sant Martí d’Empúries et, de ce fait, non fouillée), Néapolis (nouvelle ville grecque) et la ville romaine, située en hauteur.

D’un point de vue historique, c’est en 546 avant JC que Néapolis se développe : en effet, à cette date, les Phocéens étant chassés de leur cité ionienne détruite par les conquérants perses de Cyrus le Grand, et donc contraints à l’exode, affluent vers leurs différentes colonies, dont Empurion. Mais Paleopolis n’étant pas conçue pour accueillir ce surplus de population, le comptoir se trouve rapidement surpeuplé. Il faut donc construire au plus vite une nouvelle cité : ce sera Néapolis, située en bord de mer à quelques centaines de mètres du port antique d’origine.




A partir du IIIe siècle avant JC, Empurion s’allie aux Romains. Ainsi, c’est ici que débarque Scipion l’Africain, en 218 avant JC, avec l’intention de couper l’arrière-garde de l’armée d’Hannibal qui s’avance vers l’Italie. Peu à peu, la ville grecque finit par perdre son autonomie pour devenir pleinement romaine, et devient Emporiæ.


La nouvelle ville romaine, bien différente de Paléopolis et Néapolis qui continuent cependant à exister, est établie sur le large plateau qui domine le port et les quartiers grecs. On imagine aisément qu’à l’époque, le contraste doit être fort entre, d’un côté les artisans et le petit peuple du port s’activant dans les ruelles basses, et de l’autre les riches négociants romains établis en hauteur dans leurs vastes et somptueuses domus.











La ville atteint son apogée aux Ier et IIe siècles après JC. avant d’être détruite deux cents ans plus tard par une invasion venue du nord. Au fil des siècles, le site sera tour à tour investi par les Normands, les Arabes et les Francs, avant d’être définitivement abandonné. En cause, l’insalubrité des lieux qui incita les populations des alentours à se regrouper pour fonder, quinze kilomètres plus loin, la cité épiscopale de Castelló d’Empúries.
Dix-huit siècles plus tard, il nous faut tout de même faire un effort d’imagination pour se représenter la ville antique, car seules subsistent les bases des murs d’habitation. Néanmoins, quand on sait que seul un cinquième du site a été mis au jour, on perçoit facilement l’ampleur de cette cité antique !



Après s’être promenés pendant presque deux heures dans les ruelles antiques, on fait un tour au musée. Celui-ci, installé depuis plus de cent ans sur les ruines réhabilitées d’un ancien couvent, est fermé en raison du covid, mais une salle présente tout de même quelques objets retrouvés lors des fouilles. Intéressant !














Il est presque 13h quand on quitte le site, enchantés par cette visite qui nous a replongés dans un lointain passé. Après un pique-nique rapide, on emprunte la piste cyclable qui longe la mer jusqu’à Sant Martí d’Empúries.


Ensuite, c’est avec une déconcertante facilité que l’on trouve la Pirinexus, un itinéraire spécialement conçu pour les vélos et arpentant, comme son nom l’indique, toute la région frontalière des Pyrénées. Les chemins de terre sont bucoliques, et le trajet jusqu’à Sant Pere Pescador est bien plus agréable qu’à l’aller.



Passé ce gros village, on bifurque sur la route qui nous conduit en quelques kilomètres au parc naturel des Aiguamolls. Eh oui, il aurait été dommage de passer si près sans y effectuer un petit arrêt. Et de nouveau, on se régale d’observer flamants, aigrettes et même ibis falcinelle sur l’étang du Cortalet.












A partir de là, la fin du parcours est rapide – le vélo connait la route par cœur ! – et nous arrivons au camping vers 15h, au terme d’un pédalage d’une bonne soixantaine de kilomètres, ravis de cette belle journée. Demain, ce sera repos… enfin, pas tout à fait un grand ménage du camping-car s’avère indispensable, histoire d’évacuer toute la poussière infiltrée pendant les neuf jours de tramontane !
- INFOS PRATIQUES
- Camping Joncar Mar, Roses. Idéalement placé, à 100m de la mer, 10mn à pied du centre-ville et autant des supermarchés. Accueil très sympathique. Sanitaires propres et chauffés. Restaurant et épicerie ouverts toute l’année. Piscine en saison. Wifi efficace, payant (15€ les 50h, autres forfaits moins chers possibles). Electricité 6A (mais possibilité d’obtenir une seconde prise pour 50€ / mois). Environ 11.50€ la nuit, pour 2 adultes, 1 camping-car, l’électricité et les taxes dans le cadre d’un long séjour. On recommande !
- Office de Tourisme de Roses, en semaine 10h-14h & 15h-18h, le we 10h-13h. Accueil sympathique et compétent. Brochures et cartes gratuites pour les randonnées à pied / à vélo dans les environs.
- Balade à vélo jusqu’au site archéologique d’Empuriès, situé entre Sant Martí d’Empúries et l’Escala, 63km AR, plat (100m+), via Empuriabrava et Sant Pere Pescador. On conseille d’emprunter la Pirinexus de Sant Pere Pescador à Sant Martí d’Empúrie, fléchage très discret vers le pont qui enjambe le fleuve.
- Site archéologique d’Empuries, 10h-18h, fermé le lundi, 6€ / 4€ +65 ans, prévoir 2 heures de visite.