Du vendredi 28 février au lundi 3 mars
Dans le dernier article, nous vous avions laissés à Cochabamba et nous nous apprêtions à prendre un bus de nuit pour Santa Cruz. Hormis le grand bazar à la gare routière pour cause de Carnaval, rien à redire sur le voyage qui se déroule confortablement à bord d’un véhicule neuf, doté de sièges cama. Mais une fois à Santa Cruz, où nous débarquons à 6h30 vendredi matin, les choses se corsent quand il s’agit de trouver un transport pour San José de Chiquitos, petite bourgade située hors du circuit classique des voyageurs ! Après avoir un temps envisagé de prendre un bus – le prochain ne part qu’à 9h30 – on opte finalement pour un trufi, minibus dans lequel s’entassent une douzaine de passagers, tassés les uns aux autres comme des sardines en boite… Jusqu’à la sortie de Santa Cruz, tout se passe sans encombre, la circulation est même fluide. Mais soudain, le chauffeur reçoit un appel : il y a un bloqueo quelques kilomètres plus à l’est – les manifestants protestent contre l’absence d’approvisionnement en gasoil des stations-service, ce qui entraine de très longues files d’attente pour obtenir quelques litres de carburant – la route est complètement paralysée et aucun véhicule ne passe. D’ailleurs, on remarque des voitures qui opèrent un demi-tour et roulent désormais à contresens, cherchant désespérément une échappatoire. Notre trufi suit le mouvement, et nous voila partis sur une piste boueuse ; on est convaincus d’un embourbement certain, mais non, il s’en sort admirablement là où même certains 4×4 patinent. Incroyable ! Après quelques manœuvres hasardeuses – le chauffeur tente de trouver un chemin sur des pistes qui s’avèrent être en cul-de-sac – il semble que nous ayons contourné le bloqueo. Reste juste à franchir un pont – dangereux d’après des riverains – fait de deux planches de bois. Petite frayeur pour les passagers mais notre pilote de rallye passe l’obstacle sans une palpitation ! Nous rejoignons alors la nationale, toujours à contresens car un petit muret sépare les deux voies. Finalement, après quelques centaines de mètres passées à éviter les véhicules arrêtés et ceux qui arrivent face à nous, le trufi se retrouve dans la bonne direction. Une petite heure de route plus tard, un contrôle de police nous retient une trentaine de minutes : deux jeunes filles, encore mineures, sont arrêtées car elles ne possèdent pas d’autorisation parentale pour voyager seules… Et c’est reparti, cette fois sans embûche ni contre-temps, jusqu’à San José de Chiquitos où nous arrivons vers 13h.

Un premier taxi nous dépose sur la place principale où nous déjeunons face à la très belle église jésuite, et un second nous emmène à l’hôtel La Villa Chiquitana, légèrement excentré – nous aurions pu y aller à pied, mais avec les bagages et la chaleur intense, nous renonçons ! Sitôt installés, nous filons nous rafraichir à la piscine… et en fin de journée, nous enchainons avec une bonne caïpirinha, la première depuis plusieurs semaines, puis poursuivons avec un succulent dîner, pas mécontents que cette journée fatigante s’achève enfin !
- Bus Cochabamba => Santa Cruz, cie Trans Copacabana MEM1, plusieurs départs quotidiens, durée 10h, 22€ en fauteuil cama. Véhicule neuf, chauffeur prudent : on recommande cette compagnie ! Résa en ligne via Busbud.
- Trufi Santa Cruz => San Jose de Chiquitos, départs quotidiens à partir de 6h, le véhicule part quand il est plein, durée 4h30 (quand il n’y a pas de bloqueo !), Bs.70 en espèces, (attention, les trufis ne partent pas au même endroit que les bus, se renseigner, il y a un petit tunnel avec des escaliers à passer).
- A Jan Jose de Chiquitos, trajets en taxi dans le centre-ville Bs.15, à mototaxi Bs.3
- Hotel La Villa Chiquitana, un peu excentré, situé à 10mn à pied de la place principale. Peu de contact avec les propriétaires, des Français : dommage, on aurait apprécié échanger avec eux sur la région et leur expérience en Bolivie ! Personnel souriant et efficace. Bel établissement très soigné, avec piscine, jardin et salle de sport. Restaurant (très bonne table) et bar (on conseille la caïpirinha d’Ernesto, excellente !). Belle chambre, avec salle de bain privée, minibar et balcon. 378€ le forfait pour 3 nuits en demi-pension, tarif Carnaval.






San José, une ancienne réduction jésuite…
Samedi, bien reposés, c’est à pied nous nous rendons sur la place principale, agréablement ombragée par de nombreux arbres – dont le surprenant kapokier, également appelé arbre-bouteille en raison de son tronc bombé couvert de grosses épines coniques, qui possède la particularité de produire des fruits gros comme des oeufs d’autruche contenant des graines avec lesquelles on fait de l’huile !



Capitale de la province de Chiquitos, San José est une ancienne réduction jésuite fondée en 1697 dans le Bosque Seco Chiquitano, la forêt sèche la plus vaste du monde ; désormais, la petite ville vit de l’élevage, de l’agriculture et du tourisme. Elle doit son nom au peuple chiquitino qui habite la région depuis toujours, et fut la troisième mission à ouvrir ses portes dans la région, avec pour but principal l’évangélisation des indigènes. Nous visitons l’église de pierre – construite en 1731, elle domine largement la place – et ses dépendances, dont l’architecture mélange différents styles.
- Musée de l’église de San Jose de Chiquitos, 9h-12h & 15h-18h, fermé le lundi, Bs.20. Intéressant car on y découvre de nombreuses façades peintes d’époque (restaurées) et un résumé historique du site (en espagnol).





Le modèle urbain idéalisé de ces missions a pour caractéristiques la construction de maisons pour les Indiens sur les trois côtés d’une place rectangulaire, le quatrième coté étant réservé à l’église, aux ateliers et aux écoles. Contrairement à d’autres missions jésuites d’Amérique du Sud, les missions jésuites de Chiquitos ont survécu à l’expulsion de la Compagnie de Jésus en 1767 jusque dans les années 1850, date à laquelle le système des réductions a disparu. Par la suite, les bâtiments furent transformés en prison, puis en collège avant de devenir un musée.









Des masques plein la ville !
Ce qui nous surprend le plus, en ville et à l’hôtel, c’est la multitude de masques, tous représentants un visage blanc aux joues rouges et à la petite moustache noire – appelés ici máscara de Abuelo ou masque du grand-père. Certes, nous sommes en période de Carnaval, mais on comprend vite qu’il s’agit d’un fort symbole de la région. Effectivement, ces masques, apparus au moment de la colonisation espagnole, étaient principalement destinés à se moquer de l’homme blanc, autrement dit des missionnaires !







Petite balade campagnarde
Dans l’après-midi, pendant que je trempe dans la piscine, Gérard va faire un tour dans la campagne environnante. Bonne moisson côté oiseaux puisqu’il approche des guira cuckoos, des caracaras et des urubus à tête noire !









En fin de journée, même rituel que la veille : apéro et diner à l’hôtel, cette fois un savoureux buffet de spécialités locales ! Etant en période de Carnaval, on nous a prévenus qu’un défilé aurait lieu, tard sur la place du village ; un peu fatigués par la chaleur – nous ne sommes plus habitués – on zappe cet évènement et on se contente de quelques images à la télé des festivités d’Oruro, deuxième carnaval d’Amérique latine après celui de Rio…
Un dimanche bien morose…
Après le petit-déjeuner, nous partons en taxi pour le Parque Nacional Histórico Santa Cruz La Vieja qui abrite les vestiges de la première ville de Santa Cruz, fondée en 1561 par l’espagnol Ñuflo de Chávez, célèbre explorateur à qui l’on doit notamment la découverte du Paraguay ainsi que du sud-est de la Bolivie. La cité était alors bâtie sur les rives du ruisseau El Sutó, et comptait environ 32 pâtés de maisons en forme d’échiquier et une place principale au centre. En raison de divers évènements historiques, 43 ans après sa création, Santa Cruz migra deux cent cinquante kilomètres à l’ouest, avant de s’ancrer définitivement à sa place actuelle en 1591. Si l’histoire est intéressante, en revanche, sur le site on ne retrouve aucune trace d’un quelconque village ; seules trois croix récemment installées témoignent de l’ancienne colonie espagnole. Il n’y a tellement « rien » que Gérard ne fait même aucune photo, un comble… En revanche, les moustiques sont nombreux et agressifs malgré le répulsif dont on s’est enduit bras et jambes ! Résultat, alors que nous avions prévu de passer plus d’une heure sur le site, moins de 15mn après notre entrée, nous fuyons, à pied, vers San José. Là, bien transpirants, nous enchainons avec un taxi pour la gare routière : il nous faut absolument solutionner notre transport, lundi, pour la frontière brésilienne. Finalement, nous parvenons à réserver deux sièges dans un trufi qui part à 11h30… Rassurés, nous retournons un moment sur la place principale avant de rentrer déjeuner à l’hôtel. Après-midi tranquille, entre lecture et piscine, histoire d’être d’attaque pour le transport de demain !
- Parque Nacional Histórico Santa Cruz La Vieja, à 3.6km de la place principale de San José, entrée libre. Franchement, on ne recommande pas ce site dont on fait le tour en 15mn ! Beaucoup de moustiques, répulsif indispensable.
Partira, partira pas ?
Lundi matin, nous arrivons à la gare routière à 10h, pas vraiment confiants – en Bolivie, tout peut soudainement changer, surtout en matière de transport ! Malgré nos inquiétudes, nous embarquons à 11h30 à bord du trufi réservé la veille. Le chauffeur semble un peu endormi, on n’est pas rassurés mais heureusement, en ce week-end prolongé de Carnaval, il n’y a personne sur la route. Deux heures plus tard, nous arrivons à Roboré, et à notre grande surprise, nous sommes déchargés sans explication supplémentaire : on nous indique juste qu’un autre trufi devrait prendre le relais et nous emmener à Puerto Quiejaro vers 14h – ce qui s’avère exact, cette fois le conducteur roule comme un fou… Une fois à bon port, vers 17h, autre source de stress : le passage de la frontière Bolivie / Brésil ! Va-t-elle être fermée ? Ou alors surchargée avec une interminable attente ? Finalement, les formalités administratives se passent impeccablement bien, nous sommes seuls à transiter d’un bureau d’immigration à l’autre et trente minutes plus tard, nous sommes dans notre chambre – que dis-je, notre suite – du Nacional Palace Hotel, à Corumba. Sans trop savoir pourquoi, nous avons été surclassés !
- Trufi San José de Chiquitos / Puerto Quiejaro, plusieurs départs quotidiens dont un à 11h30, durée 5h30 (avec le changement imprévu à Roboré), moyen de transport fatigant, incertain et dangereux, Bs.110 ; taxi pour la frontière (de la gare routière de PQ), Bs.40
- Passage de la frontière Bolivie / Brésil rapide et sans encombre, prévoir le QR code pour la sortie de la Bolivie ; taxi pour le centre-ville R$50
- Nacional Palace Hotel, à Corumba, très bien situé à deux cuadras de la place principale et des restaurants. Sûrement le plus bel hôtel de la ville, accueil agréable, piscine, bar, salon. Excellent petit-déjeuner. Très belle suite avec jacuzzi (nous avons été surclassés), environ 80€ la nuit avec le petit-déjeuner. On recommande !



Viva Carnaval !
Décidément, toutes ces inquiétudes liées au transport en Bolivie, au passage de la frontière et à cette période de Carnaval nous auront gâché le week-end à San José ; j’ai même eu l’impression de n’avoir profité de rien, tant nous étions préoccupés à l’idée de rester coincés dans cette campagne perdue ! On retrouve un léger sourire à Corumba où, après avoir dîner dans une ambiance bruyante et festive, nous assistons au début du défilé du Carnaval…

















Mardi soir, nous quitterons la région frontalière pour Campo Grande, une étape de deux nuits, surtout destinée à couper la longue route pour Brasilia…